Auteur
Anaïs
Simard-Gendron
Directrice de thèse
Bignami, Simona
Jury(s)
Bignami, Simona
La question démographique, occupant une place centrale au coeur du conflit qui sévit en Israël et en Palestine, a fait couler beaucoup d’encre. De nombreux chercheurs issus de disciplines telles que la sociologie, la science politique ou même la philosophie ont contribué à la compréhension des origines de ce conflit et de ses conséquences sur les populations humaines. Il va sans dire que les enjeux qui y sont associés sont nombreux et que, pour les comprendre de manière exhaustive, l’interaction de nombreuses disciplines est requise. Puisqu’il s’agit ici d’une thèse en démographie, nous nous limitons aux aspects démographiques du conflit israélo-palestinien. De nombreux ouvrages rigoureux dans d’autres disciplines sont disponibles pour une approche plus holistique.La fécondité exceptionnelle observée dans la région est souvent associée à une “guerre des berceaux” visant ultimement à obtenir la majorité sur le territoire. Plusieurs théories visant à lier fécondité et contexte politique ont émergé dans la littérature démographique mais aucune d’entre elles n’a été vérifiée empiriquement à la fois auprès des populations palestiniennes et juives (en Israël et dans les territoires palestiniens de la Cisjordanie et Gaza). Ainsi, dans la poursuite de cette thèse, nous souhaitons explorer des avenues qui nous permettraient d’enrichir la connaissance des dynamiques de fécondité dans la région et contribuer à l’effort collectif visant à mieux évaluer les conséquences d’un conflit endémique sur les comportements reproductifs.Le premier objectif de cette thèse par articles consiste à dresser un bilan de l’état de la fécondité chez les Juives et les Palestiniennes demeurant en Israël et dans les territoires palestiniens en accordant un intérêt particulier à certains déterminants de la fécondité tels que : la contraception, l’âge au mariage, l’origine ethnique et la religiosité. Tout en prenant en considération l’importante hétérogénéité des groupes d’intérêt, nous cherchons à établir certaines similitudes entre Palestiniennes et Juives d’Israël et des territoires palestiniens, qui sont exposées, à des niveaux variables, aux conséquences du conflit. Il s’agit d’une première tentative afin de regrouper ces individus dans une même étude à l’aide de données d’enquêtes.En second lieu, nous visons à faire la lumière sur les différents comportements de fécondité des Juives en Israël et dans les colonies des territoires palestiniens afin de départager les effets des principaux déterminants de la fécondité israélienne (nationalisme, religiosité et statut socioéconomique) dans les deux régions et leurs évolutions temporelles grâce à des données de recensement. Bien que de nombreuses études se soient penchées sur la fécondité israélienne au niveau national, peu se sont attardées à étudier la sous-population constituée par les colons juifs qui demeure, par conséquent, largement méconnue.Finalement, nous nous intéressons à l’influence exercée par des facteurs individuels et contextuels sur la fécondité des Palestiniennes en Cisjordanie et à Gaza. Nous tentons de quantifier les effets du contexte et du nationalisme sur la fécondité. L’objectif consiste principalement à analyser les facteurs liés à la fécondité palestinienne en mettant l’accent sur le rôle des variables contextuelles tout en prenant en compte les divers facteurs socioéconomiques et démographiques. Bien que le conflit soit régulièrement invoqué dans l’explication de la fécondité palestinienne, aucune étude n’a encore démontré empiriquement son rôle.Les conclusions de cette thèse apportent un éclairage important à la recherche sur la fécondité dans cette région. En effet, il en ressort que les déterminants habituels de la fécondité ne semblent pas avoir un impact majeur sur la fécondité. Cette relative inefficacité des déterminants “classiques” de la fécondité s’expliquerait en partie par des conséquences du conflit. Il en découle une religiosité accrue dans de nombreuses tranches de la population, un fort sentiment nationaliste et des institutions qui veillent à éliminer les obstacles à la fécondité grâce à de nombreux incitatifs fiscaux. Dans un climat social et politique incertain, les valeurs traditionnelles familiales procurent une certaine stabilité.